dimanche 3 mai 2009

Grippe A H1N1 : « La France est prête à faire face à une épidémie »

Le virus de la grippe A H1N1 remet sous le feu de l'actualité la crainte d'une pandémie d'ampleur majeure. Mais pour le Pr Yazdanpanah, du service des maladies inectieuses de l'hôpital de Tourcoing, aussi inquiétante soit-elle, la maladie pourrait être correctement prise en charge en France.

La grippe A H1N1 sévit depuis une quinzaine de jours. Faut-il en avoir peur ?

Il faut en tout cas être vigilant car il y a des motifs d'inquiétude. D'abord parce qu'il s'agit d'une grippe survenue au Mexique à un moment inattendu, hors grippe saisonnière. (Voir le document ci-contre qui montre que les températures sont identiques actuellement à Mexico et à Paris).
L'examen de la souche montre aussi qu'il s'agit d'un virus hybride, avec une combinaison jusque-là inconnue des gènes de la grippe humaine, aviaire et porcine, qui se transmet d'homme à homme. Ce qui est inquiétant aussi, c'est qu'on trouve des cas de décès chez des personnes jeunes alors que les populations à risque de la grippe sont plutôt des personnes âgées. Donc, il est clair qu'il se passe quelque chose. Pour autant, il y a des choses rassurantes : aux États-Unis, les formes de grippe décelées semblent moins sévères qu'au Mexique.

La France est-elle prête à faire face à cette maladie ?

En termes de prise en charge, je pense que nous sommes prêts à faire face à une épidémie qui toucherait la France. De plus, le virus semble bien réagir aux traitements antiviraux disponibles. Cela dit, on ne peut pas encore connaître la gravité de ce nouveau virus ni combien de cas seront affectés.

Faut-il croire à la perspective d'un scénario noir comme ceux des grandes épidémies de grippes du XXe siècle qui ont fait des millions de morts ?

On peut avoir des grandes pandémies. Mais on n'agira évidemment pas en 2009 comme en 1918. Les moyens de lutte contre ces maladies sont incomparablement meilleurs.

L'emballement médiatique autour de ces nouvelles maladies, SRAS, grippe aviaire, grippe A H1N1 vous semble-t-il justifié ?

Il y a du positif et du négatif dans ce phénomène. Bien sûr, il ne faut pas tirer de scénario catastrophe qui a pour effet d'angoisser la population. Mais la diffusion d'informations a aussi des effets positifs. Elles agissent sur le comportement des gens, qui font davantage preuve de prudence.

Votre prédécesseur dans ce service, le Pr Mouton, disait que le XXIe siècle serait celui des virus. Vous êtes d'accord ?

Ce qui est sûr, c'est que leur propagation est facilitée. Les gens et les animaux voyagent beaucoup. Avant, les virus restaient sur place, là où ils naissaient. Et puis le fait est aussi que les techniques d'identification des virus ont beaucoup évolué et se sont améliorées. On les détecte mieux. Mais il aussi vrai que de nouveaux virus se déclarent chez l'homme, comme récemment le virus cowpox, transmis par le rat.
C'est sans doute lié aux nouveaux comportements. Sur le cowpox, par exemple, j'ai été surpris de découvrir que des gens pouvaient avoir jusqu'à vingt rats en élevage chez eux.

La recherche sur ces virus qui posent un défi à la communauté médicale est-elle suffisamment financée ?

Il n'y a jamais assez d'argent pour la recherche. Pour le VIH, on a des moyens par le biais de l'agence nationale de recherche contre le sida. Mais pour le reste des maladies infectieuses, c'est beaucoup plus compliqué de décrocher des financements.