lundi 12 octobre 2009

La complexe mise en place de la campagne de vaccination contre la grippe A (H1N1) en France

Adressée à toute la population, fondée sur le volontariat, la campagne de vaccination contre la grippe A (H1N1) a quelque chose de vertigineux. Personne ne peut prévoir la proportion de ceux qui vont décider de se faire vacciner à partir de la fin octobre. Il faut veiller à respecter un intervalle entre les deux injections et utiliser le même vaccin du même fabricant pour le rappel. Un travail qui apparaît au fil des jours d'une grande complexité. « On se lève tous les matins avec une équation à résoudre », confie Raphaël Glabi, directeur adjoint de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales dans le département du Rhône.

L'organisation s'avère difficile à mettre en place. Ce sont les caisses primaires d'assurance maladie qui enverront les « bons de vaccination », sans oublier les régimes spéciaux comme ceux des fonctionnaires, de la SNCF, de la RATP, de la Banque de France, des membres du clergé ... et les caisses des indépendants et du monde agricole. Ces bons comporteront les coordonnées des centres les plus proches et accorderont un délai d'une dizaine de jours pour se présenter. L'envoi de ces bons se fera en respectant les catégories prioritaires (femmes enceintes de plus de trois mois, entourage des nourrissons, sujets de 2 à 64 ans avec facteurs de risque ...). En tout ce sont 14 catégories qui ont été définies. Faut-il encore, également, que les renseignements médicaux soient à jour, et que les adresses soient actualisées. Quand on connaît le taux de retour d'un simple mailing pour adresses incorrectes, on peut s'inquiéter. Les choses se corsent quand il faut identifier les personnes prioritaires en croisant différents fichiers et en évitant les doublons. Mais le plus à craindre ce ne sont pas les doublons mais les oublis. Pour complexifier davantage certaines populations seront vaccinées sur le lieu de travail, comme les personnels de santé, ou sur place par des équipes mobiles, c'est le cas notamment des établissements scolaires, des centres d'apprentissage et des maisons de retraite.

Il est difficile de prévoir à quel moment certains centres seront surchargés ou au contraire désertés.
Dans le département du Rhône, la préfecture est partie de l'hypothèse la plus haute pour organiser au mieux l'opération. A Lille, ce samedi, a eu lieu une répétition. On table sur la nécessité de un ou deux médecins par centre qui ne seront pas vaccinateurs. Les vaccins seront administrés par des infirmières et des étudiants. Il a fallu battre le rappel et même parfois envisager les possibilités de réquisition. Une situation ubuesque, dans laquelle il s'agirait d'obliger des médecins à quitter leur travail ... pour s'occuper d'autres patients, alors qu'ils auraient pu effectuer cela auprès de leur propre patientèle. Le parcours de soins devient à géométrie variable ! L'Ordre des médecins du Finistère a reçu 90 candidatures de volontaires prêts à encadrer la campagne de vaccination contre la grippe A. Le Dr François Simon, président de l'Ordre des médecins du Finistère et conseiller nationale garde en mémoire le souvenir de la dernière pandémie de grippe, au début de sa carrière de médecin généraliste.

Cent morts en 1970 à l'hôpital de Brest
« Entre décembre 1969 et janvier 1970, il y a eu quatre à cinq semaines où la vie sociale a été fortement désorganisée. On évoquait écoles fermées et services de sécurité sociale désertés. Mais on ne parlait pas des décès. Ce n'est que plus tard, lors d'un congrès de pneumologie, en 1971, que j'ai appris qu'il y avait eu, à cette époque, cent morts dus à la grippe dans le service de pneumologie du Pr Kerbrat, à l'hôpital ». L'expérience a conduit, dans les années 70 et 80, à la mise en place des campagnes de vaccination pour les plus fragiles. « Une campagne vraiment efficace doit toucher 70 à 80 % de la population. La grippe peut aussi faire mourir des personnes sans facteurs de risque par syndrome de détresse respiratoire aiguë. La vaccination est aussi là pour éviter des drames. Si un membre de la famille ramène la grippe à la maison, contamine et voit mourir un proche, c'est terrible. Les phénomènes de défiance à l'égard des nouveaux vaccins sont fréquents. On oublie que des maladies mortelles comme la variole, le tétanos, la polio ou la diphtérie ont été maîtrisées, voire éradiquées, grâce aux vaccins ».