jeudi 24 décembre 2009
Un échec cuisant sur lequel il va falloir se pencher
Le point de vue d'Antoine Flahault.
Souvenons-nous : Août-septembre 2009, nous franchissions une première étape, un premier gué de la pandémie. Les digues australes avaient tenu. Le virus s’était montré certes contagieux mais d’une virulence à deux vitesses. Peu agressif chez la plupart des personnes qu’il infectait, il pouvait aussi devenir redoutable chez une petite minorité (parfois sans facteurs de risque apparents et donc sans que l’on comprenne précisément pourquoi). Août-septembre 2009 était un peu la « drôle de guerre » de cette pandémie dans l’hémisphère Nord. Nous étions campés dans nos tranchées, les stocks de minutions s’accumulaient (dans certains pays) et bientôt les premières controverses éclataient. L’Etat en faisait trop. L’indécence était dénoncée. Les experts agissaient au nom d’intérêts inavoués. Rien ne venait. Rien ne viendrait peut-être. Puis l’automne de l’année 2009 a dévoilé (en dépit de la douceur quasi-inégalée des températures) le visage encore certes inconnu de cette grippe, mais fidèle aux photographies transmises par l’hémisphère Sud pendant notre été.
Dresser en ce premier jour de l’hiver le bilan de cette pandémie ? N’est-il pas un peu tôt pour penser que la saison est terminée « jusqu’à l’arrivée de l’hiver austral suivant » ? Peut-on affirmer que la souche qui reviendra sera beaucoup plus virulente et qu’elle nécessitera de jeter les stocks de vaccins actuels ? Il ne me semble pas aujourd’hui possible de l’affirmer.
Je ne crois pas pour ma part qu’il soit inopportun de continuer les vaccinations. Je suis d’accord cependant de reconnaître que la campagne des vaccinations a été un échec cuisant sur lequel il va falloir se pencher. Pour une fois que nous avions prévu qu’une pandémie de grippe allait arriver… Pour une fois que nous avions dimensionné les usines de production du vaccin de manière à ce qu’il soit disponible pour tous…. Pour une fois que nous disposions d’un vaccin efficace et sûr seulement quelques mois après l’émergence d’un virus… Force est bien de constater que la population française s’est montrée réticente à suivre les recommandations préconisées. Ce qui se vérifie aussi dans la plupart des pays occidentaux. Il est trop tôt pour dresser le bilan de tout cela. Mais ce bilan sera bien évidemment fait un jour. Avec aujourd’hui ce constat : Il n’est pas possible de vacciner en masse une population qui ne le souhaite pas. Pourquoi ? Il conviendra d’investir davantage dans les recherches multidisciplinaires qui nous permettront de comprendre un jour prochain pourquoi nos contemporains n’ont pas souhaités se protéger quand on leur a proposé.
Nous nous posons les mêmes questions concernant les masques.
Mais serait-il dangereux de se faire vacciner aujourd’hui ? Pourquoi donc ? Se faire vacciner, par un vaccin dont on a une expérience planétaire plutôt réussie, ne me semble pas faire courir un risque particulier, et peut encore protéger contre le retour certes hypothétique du virus durant l’hiver. Je ne crois donc pas que ce soit un mauvais calcul, même si je reconnais qu’il est un peu tardif. Quant à l’utilisation du Tamiflu, le Dr Fisch a raison de souligner qu’il manque encore des preuves de son efficacité, notamment dans la prévention des complications de la grippe. Il n’y a pas non plus d’évaluation bien conduite de son utilisation de masse. Cependant, c’est un médicament qui a montré son efficacité et sa relative innocuité en traitement et en prophylaxie individuels, à partir de plusieurs essais cliniques convaincants. Efficacité, mais pas miracle thérapeutique ! Inocuité, mais pas absence d’effets indésirables… Nous sommes bel et bien aujourd’hui sur le deuxième gué. Combien sont à venir ? Quelle sera l’ampleur des prochaines crues ? La suite, comme toujours est à écrire. Ensemble.