dimanche 20 décembre 2009

La signature immunologique des formes sévères de grippe

En analysant la réponse immune dans les cinq premiers jours d’une grippe A (H1N1), des chercheurs ont découvert une signature liée à la forme sévère avec insuffisance respiratoire, caractérisée par la sécrétion précoce de cytokines Th17 et Th1.

Alors que la grossesse et les troubles métaboliques (dont l’obésité et le diabète) constituent des facteurs de risque de forme sévère, 40 à 50 % des sujets décédés de la grippe A (H1N1) n’avaient aucune pathologie sous-jacente. Il a été montré en outre, chez les rongeurs et les singes, que ce virus provoque une pathologie pulmonaire plus sévère que celui de la grippe saisonnière. Afin d’en savoir davantage, une équipe espagnole et canadienne a conduit une étude dans plusieurs hôpitaux espagnols durant la première vague de grippe A (H1N1) en juillet et août 2009. Ils ont analysé le sérum prélevé dans les cinq premiers jours des symptômes grippaux chez 20 patients hospitalisés pour une forme sévère avec insuffisance respiratoire (10 admis en USI) et chez 15 patients vus en consultation pour une forme légère. Ils ont mesuré le profil d’une trentaine de cytokines et chimiokines, ainsi que la charge virale. Ils ont aussi étudié un groupe témoin de 15 sujets sains.

L’infection induit une réponse immunitaire innée typique (IP-10, MCP-1, MIP-1bêta) tant en cas de forme légère que sévère. La différence s’observe dans la réponse immunitaire secondaire. La forme sévère avec atteinte respiratoire est caractérisée par des taux systémiques élevés d’interféron (IFN-gamma) et une hypersécrétion de cytokines de type Th-17 (IL-17, IL-8, IL-9, IL-6) et Th-1 (IL-15 et IL-12p70) habituellement associées a une immunité à médiation cellulaire, mais aussi à la pathogenèse de maladies auto-immunes ou inflammatoires. L’IL-15, l’IL-12p70 et l’IL-6 constituent un signe cardinal de la maladie gravissime. Les études à venir devront préciser quels rôles jouent exactement les cytokines de type Th-17 et de type Th-1 dans l’évolution des formes légères et sévères et, notamment, quel est leur rôle dans la forme sévère. « En ciblant ou en bloquant la réponse Th-17, dans le futur, nous pourrions potentiellement réduire la réaction inflammatoire dans les poumons et accélérer la guérison », explique dans un communiqué le Dr David Kelvin, chef du Service de thérapeutique expérimentale au Toronto General Hospital Research Institute. Il entrevoit dans un futur proche la possibilité d’un test pour identifier précocement les patients encourant un risque de forme sévère.

Docteur Véronique Nguyen « Journal of Critical Care », 15 décembre 2009