Refaisons l'expérience avec les auteurs de l'Université de Chapel Hill, Caroline du nord, pour que chacun puisse juger en toute connaissance ! Il s'agit de prendre deux lots de souris mâles bien connues des laboratoires, des C57 BL6, et de supplémenter, le premier, par un régime à 4 g d'huile de menhaden (hareng des côtes de Louisiane), plus un gramme d'huile de maïs, et le second, au maïs seulement, pendant deux semaines, puis d'infecter tout le monde par le virus grippal, en l'occurrence de l'Influenza A/PuertoRico/8/34. Que deviennent les souris ?
vendredi 14 août 2009
Un régime sans poisson pour moins mourir de la grippe ?
Les premières, avec des poumons moins enflammés que les secondes, souffrent cependant d'un taux de mortalité plus élevé de 40 %, d'une charge virale pulmonaire plus forte de 70 % à J7, et d'une convalescence plus longue (pour celles qui s'en sortent). A l'autopsie, leurs poumons comportent significativement moins de cellules T CD8+ et les médiateurs de l'inflammation, TNF, interleukine 6 et autres, sont moins exprimés. Un ensemble de résultats qui montrent clairement, pour les auteurs, que les propriétés anti-inflammatoires des huiles de poisson nuisent à la réponse immunitaire anti-influenzae, d'où une morbidité et une mortalité accrues...
Ces données et ces faits sont-ils surprenants ? Pas tant que cela en réalité, car les effets anti-inflammatoires des acides gras poly-insaturés sont certes connus depuis longtemps, et mis à profit avec un certain succès dans quelques maladies chroniques inflammatoires, mais le problème est que, ce même effet, dans d'autres conditions, pourrait s'avérer néfaste. Et justement, ces conditions pourraient se trouver bientôt réunies : une population occidentale adepte de sushi et gavée de suppléments alimentaires à base d'huile de poisson sur laquelle déferlerait l'une des plus vastes pandémie de grippe jamais connue !
Nous ne sommes pas des souris C57BL6, c'est sûr, et il faut d'ailleurs remarquer qu'une autre expérience, réalisée par des Australiens sur des souris BALB/c, s'était révélée moins désastreuse pour elles. Les rongeurs invités à consommer plus d'huile de poisson (versus suif de boeuf) avaient "seulement" montré un retard à la clairance virale avec des productions d'interféron gamma et d'immunoglobulines A pulmonaires moindres, des pertes de poids et d'appétit supérieures et finalement une évolution plus longue.
Nous ne sommes pas non plus des souris BALB/C, c'est d'accord aussi ! Mais quand même. Le principe de précaution, par ailleurs souvent décrié en infectiologie, invite pour cette fois à ne pas trop chercher à savoir si nous sommes plus proches des unes que des autres.