Cellules de crise, plans d'urgence, commande massive de vaccins : le gouvernement français se prépare tous azimuts face à la montée en puissance de l'épidémie de grippe A (H1N1) attendue dans l'hémisphère nord pour l'automne, au risque de paraître en faire trop. La France métropolitaine, où la circulation du virus reste "limitée" et qui reste à ce jour en niveau 5 d'alerte dit "pré-pandémique", a recensé 1 223 cas de la nouvelle grippe depuis le début de l'épidémie. Cinq décès ont été signalés, dont quatre en Outremer (hémisphère sud), tous sur des personnes souffrant de pathologies associées. Des experts estiment que jusqu'à un tiers de la population métropolitaine (soit 20 millions de personnes) pourrait être contaminée au cours de l'hiver. Par comparaison, la grippe saisonnière -avec un taux de mortalité similaire - touche chaque année en moyenne 2,5 millions de personnes, faisant 2 500 morts. Le virus A (H1N1), peu virulent, est dangereux surtout pour les personnes fragilisées. Extrêmement contagieux, il touche davantage les jeunes. A cet égard, la rentrée scolaire risque de multiplier les cas, vu la promiscuité entre les enfants. Fin juillet, la ministre de la santé Roselyne Bachelot indiquait que la France pourrait passer à ce moment-là en stade d'alerte pandémique (niveau 6), qui prévoit des mesures drastiques telles que fermeture d'écoles ou interdictions de réunions publiques ; mais ne les impose pas. Mercredi, elle a estimé qu'il fallait "se préparer à toutes les éventualités". La veille, le ministre de l'Education Luc Chatel, dans le cadre de son plan d'urgence pour la rentrée, prévoyait que des classes, voire des écoles, soient fermées pendant six jours, dès que trois cas en une semaine seront comptabilisés dans une classe.
Certains jugent que le gouvernement en fait trop pour une grippe qui se soigne le plus souvent avec du simple Paracétamol. Le Pr Bernard Debré parle de "grippette", l'ancien président de la Croix-Rouge Marc Gentilini reproche au gouvernement son discours "alarmiste". Quoi qu'il en soit, le gouvernement, qui se réunit chaque mercredi en cellule de crise au ministère de l'Intérieur, va lancer une vaste campagne de vaccination. Voulant assurer à tous "la possibilité de se faire vacciner", même s'il faut deux doses, les responsables ont commandé pas moins de 94 millions de doses à des laboratoires, avec une pré-réservation de 36 autres millions de doses. Mais il faudra encore que les commandes soient prêtes avant l'hiver. D'après l'Organisation mondiale de la santé, l'approvisionnement devrait être "très limité" quand la pandémie montera en puissance dans l'hémisphère nord. Chez Sanofi-Pasteur, le numéro 1 du vaccin au monde (commande française : 28 millions de doses), on attend le début de la mise sur le marché massive pour novembre. GlaxoSmithKline, le Britannique (50 millions de doses), annonce ses premières ventes pour septembre. Novartis (16 millions de doses) parle de "l'automne". Comme il n'y aura pas tout de suite des vaccins pour tout le monde, le gouvernement définira en septembre les personnes prioritaires - probablement personnels de santé, femmes enceintes, personnes fragilisées par des maladies chroniques -, après étude de l'évolution du virus dans l'hémisphère austral. On saura aussi alors le nombre d'injections qui seront nécessaires. Si les écoles ferment, que feront les parents qui travaillent ? Il faudra de la "solidarité", a dit M. Chatel. Des syndicats s'inquiètent d'un risque d'absentéisme massif. Une "cellule de continuité économique" a été mise en place au ministère de l'Economie.