mercredi 17 juin 2009

Pour la grippe A (H1N1) qui doit recevoir du Tamiflu ?

D'un côté on évoque une grippe A (H1N1) qui n'est pas plus grave qu'une grippe saisonnière, quel serait donc l'intérêt d'un traitement antiviral qui par ailleurs empêche une immunisation naturelle ? C'est pourtant ce qui est fait depuis plusieurs semaines.
D'un autre côté on constate que depuis le début de la diffusion du virus l'utilisation systématique du Tamiflu et du Relenza coïncide avec une létalité moindre par rapport à la situation constatée au Mexique à l'origine. Ces traitements diminuent-ils la mortalité ?

La question impose une réponse rapide car la stratégie actuelle va laisser principalement aux généralistes le choix du traitement approprié. On peut comprendre le désarroi des malades potentiels ou réels et les début de panique que l'on a pu constater dans certaines situations. Face à une première vague de pandémie, est-il logique de traiter largement ? En se privant ainsi des moyens (en attendant un vaccin qui pour l'instant n'est pas testé) pour une deuxième vague beaucoup plus virulente.

Qu'en est-il des stocks de Tamiflu en France ?

La France dispose d'un potentiel de 33 millions de traitements antiviraux dont 24 millions de Tamiflu et 9 millions de Relenza, ces derniers ne posant pas de problème de péremption. Ce stock est pour l'instant constitué de 15 tonnes de Tamiflu sous forme de poudre et de 7,2 millions de traitements sous forme de gélules dont seuls environ 500 000 arriveraient au terme de la période de 5 ans. Le laboratoire Roche a mis en œuvre des procédures pour modifier l'autorisation de mise sur le marché de Tamiflu afin que l'on puisse passer sans risque de 5 à 7 ans. Quant aux antiviraux conservés sous forme de poudre, le délai de péremption est de 10 ans.

L'Agence européenne du médicament (EMEA) a décidé de prolonger de deux ans l'usage des stocks de Tamiflu potentiellement périmés. Si la Commission européenne est d'accord ce délai passera de 5 à 7 ans. Et l'on voit mal Bruxelles s'opposer aux experts de l'EMEA. Ils estiment que le cas échéant le traitement pourra être prescrit aux enfants de moins d'un an ainsi qu'aux femmes enceintes ou allaitantes, ce qui était jusqu'à présent formellement contre indiqué. Les bénéfices éventuels en cas de pandémie étant de nature à dépasser les risques encourus. Ces mêmes experts précisent que le moment pandémique venu, ce sera à chaque médecin prescripteur " de peser soigneusement le bénéfice et les risques pour chaque patient ".

Quelle est l'efficacité du Tamiflu vis-à-vis du nouveau virus grippal A (H1N1) ?

" On constate que ce type de virus est, dans certains pays et à des degrés divers, devenu résistant en 2 ans à ce médicament alors qu'il a été assez peu utilisé pour traiter des grippes saisonnières " a déclaré Alain Goudreau, chef du département de bactériologie-virologie du CHU de Tours. " Comme nombre de mes collèges, j'ai été stupéfait que ces virus apparaissent comme spontanément résistants à une molécule pour la première fois dirigée contre eux. Ce type de situation était connu pour les bactéries. C'est plus troublant pour les virus ".

" Les résultats de premiers séquençages du nouveau virus A (H1N1) montre qu'il est génétiquement très différent des autres A (H1N1) saisonniers devenus résistants au Tamiflu. Pour autant les spécialistes de virologie ne sont guère rassurés devant le caractère atypique de son profil génétique. L'autre motif d'inquiétude vient du fait que l'apparition des résistances virales à Tamiflu ne semble pas résulter, comme dans le cas des bactéries et des antibiotiques, d'une trop grande utilisation de cet antiviral. D'autres mécanismes seraient impliqués ".