La façon dont le Mexique a réagit face à cette épidémie est intéressante à étudier pour comprendre ce qu'il convient de faire ... ou de ne pas faire. On remarque notamment l'absence d'explication sur la manière d'utiliser les masques. Par contre il se confirme qu'une épidémie d'une telle ampleur a rapidement des conséquences sur l'économie et la vie quotidienne, avec la fermeture et l'arrêt de nombreuses activités ... ce que tout le monde ne comprends pas.
La crainte de la grippe porcine a vidé les rues de Mexico ce qui a permis à Alberto Cardenas d'être servi tout de suite dans le petit restaurant de "tacos" dont il est le seul client.
"J'avais décidé de ne pas manger de tacos (galettes de maïs) aujourd'hui, alors que je le fais tous les dimanches, et avec cette histoire de grippe porcine je pensais plutôt me préparer quelque chose chez moi, mais en passant ici je n'ai pas résisté à la tentation", explique ce jeune homme de 27 ans. Et il mord une grande bouchée de sa galette farcie de "chicharron", autrement dit de couenne de porc frite à l'huile...
"Bof! Ils ont dit que manger du porc n'était pas dangereux, et ces tacos-là sont mes préférés", s'esclaffe-t-il.
En ce dimanche, la plupart des habitants de cette capitale de 20 millions d'habitants ont préféré rester chez eux, plutôt que de risquer la contamination.
"Nous tournons à 20% de notre capacité, peut-être moins", confirme un serveur de la "taqueria".
Soledad Rojas et sa fille de 12 ans, le masque sur le nez, font partie des très rares promeneuses du Parc Mexico, au coeur de la capitale. Elles ont voulu vivre ce dimanche ensoleillé comme à leur habitude, mais elles reconnaissent être "nerveuses, préoccupées", surtout en constatant que peu de monde a fait comme elles.
"Nous ne pouvons pas vivre enfermées à la maison. Le dimanche est le seul jour que nous passons ensemble, parce que je travaille du lundi au samedi", explique Soledad.
"En fait, je croyais que tout le monde penserait comme moi, mais non, le parc est vide, en comparaison des autres dimanches", ajoute-t-elle.
Avec une grimace comique, cette jeune maman résume les privations imposées par la grippe: "samedi soir, je n'ai pas pu aller boire un verre avec mes copines, dimanche matin nous n'avons pas pu aller à la messe, et ma fille n'ira pas en classe, pour je ne sais combien de temps"...
La municipalité a fait fermer bars de nuit et discothèques, et les messes ont été annulées, à part celle que le cardinal de Mexico a célébrée à la cathédrale, à huis-clos et devant les caméras de télévisions.
Ecoles, lycées et facultés sont fermés, et les cours ne reprendront pas avant le 6 mai.
"Je demande seulement à Dieu que l'épidémie soit contrôlée et que le virus ne devienne pas plus dangereux", conclut Soledad en ajustant son masque.
Ces petits masques de chirurgien constituent le moyen de prévention le plus élémentaire, et le plus couru. Les pharmacies ont été dévalisées tôt vendredi matin, dès l'annonce de l'accès de grippe porcine, et désormais les militaires en assurent la distribution gratuite, dans la rue.
"Le problème, c'est qu'on ne sait pas bien où et quand l'utiliser, et nous le mettons et l'enlevons au gré de l'intuition", souligne Rosa Maria Juarez, petite brune d'une trentaine d'années, alors qu'elle enlève le sien en descendant de voiture.
Avec son fiancé, elle s'en va à visage découvert boire un jus de fruit dans un café select, dont les serveurs ne portent pas de masque. Mais dehors, les "valet parking" qui se chargent de garer les voitures portent non seulement le masque, mais des gants chirurgicaux.