mercredi 9 janvier 2008

La grippe aviaire aux portes d’Haïti

La présence d’un virus de la grippe aviaire, découvert au cours du mois dernier au sein de deux groupes distincts de coqs de combat, en République Dominicaine, constitue une réelle menace pour Haïti, selon des considérations de plusieurs spécialistes consultés par Agropresse.

Le virus présent en République Dominicaine n’est pas le H5N1, hautement pathogène, mais bien le H5N2 qui est beaucoup plus inoffensif et déjà présent dans plusieurs pays de l’Amérique comme les États-Unis et le Canada.

Cependant, par mesure de précaution, tout comme ont fait d’autres d’autres pays de la région, les autorités haїtiennes ont décidé, depuis le 4 janvier 2008, d’interdire, d’une manière formelle, l’importation de tous les produits avicoles (œufs, volailles, poussins, entre autres choses) provenant de la République voisine.

En décembre 2007, les aurotirés dominicaines ont décelé deux cas de volailles porteuses du virus H5N2 : un coq de combat porteur, dans un groupe de 15 volailles à Higuey (province d’Altagracia), et un autre, dans un groupe de 115 volailles à la capitale, Santo-Domingo. Les volailles de ces deux groupes ont dû être abbatues.

Le diagnostic définitif a été établi par le laboratoire américain d’Ames dans l’Iowa (États-Unis), un laboratoire de référence de l’Office International des Épizooties (OIE). Le rapport en question a été diffusé le 21 décembre dernier, par l’Office International des Épizooties, l’instance mondiale de surveillances des maladies animales.

De très mauvaises nouvelles

Pour l’agronome Henri Châtelain, producteur avicole, même si il ne s’agit que d’un virus moins dangeureux, ce sont-là de très mauvaises nouvelles. « C’est la première fois qu’un virus de la grippe aviaire est officiellement diagnostiqué sur l’île » et cette maladie « constitue, aujourd’hui plus que jamais, une mecace sérieuse pour Haïti et pour la santé de la population », déclare-t-il à Agropresse.

Le spécialiste souligne que les producteurs de poulets de chair d’Haïti, qui ont « l’habitude de s’apprivoinnner en poussins en République Dominicaine » devront, à présent, se « tourner vers d’autres sources d’approvisionnent, ce qui signifie un coût de transport plus élevé entraînant par le fait même un coût plus élevé de production ».

Agir vite

Le Dr Michel Chancy, directeur de l’organisme non gouvernemental Veterimed, invite les autorités haitiennes à « agir vite ». Car, estime le spécialiste en santé animale, « à cause de l’interdiction d’importer des produits avicoles chez nous, nous risquons de subir une pression énorme non seulement de producteurs dominicains, mais également des commerçants haïtiens qui importent ces œufs et les commercialisent ».

20 % de la production mensuelle dominicaine d’œufs de table (soit 30 millions d’œufs par mois) sont exportés en Haiti. « Ce qui est énorme », s’exclame Chancy dans un entretien accordé à Agropresse.

Parallèlement, en Haïti, les amateurs de coqs de combat font venir régulièrement leurs coqs de la République Dominicaine. « Les risques d’introduction de la maladie en Haïti par ce type d’importation sont bien réels », avance le directeur de Veterimed.

Le virus H5N2 a été trouvé au cours d’examens de routine qui ont été procédés sur des coqs de combat destinés à être exportés vers la Colombie. Selon les Domincicains, les coqs de combat qui ont été touchés par la grippe aviaire seraient entrés d’une manière illégale et proviendraient d’un (ou d’autres) pays étranger(s) non précisés.

La présence d’un des virus de la grippe aviaire en République Dominicaine, en dépit de ses aspects négatifs, pourrait servir d’opportunité à certains secteurs pour investir davantage dans la production avicole nationale, notamment dans la production d’œufs de table, considère M. Chancy.

L’Association haitienne pour la promotion de l’élevage est en train de participer à la mise sur pied de 500 unités de production d’œufs avec des associations de femmes à Cité Soleil (périphérie nord de la capitale), informe-t-il. L’objectif de production est de 15 000 à 18 000 œufs de table par jour à la fin de janvier.

Échanges commerciaux, courroie de transmission du virus

Il est admis que les échanges commerciaux constituent l’une des formes de propagation les plus communes de la maladie. Le virus peut être également introduit par des oiseaux migrateurs. Un bon nombre d’oiseaux migrateurs ont des passages réguliers en Haïti et en République Dominicaine.

Le ministère haïtien de l’Agriculture a récemment mis un dispositif de surveillance sur les plans d’eau du pays constituant des reposoires naturels des oiseaux migrateurs.

Le virus H5N1 fait, à l’heure actuelle, des ravages en Asie. Ce virus hautement pathogène est également présent en Afrique, en Europe et dans 32 pays. Il est responsable de la perte de plus 200 millions de volailles (principalement abattues par les autorités gouvernementales afin de livrer une guerre sans merci à cette terrible maladie transmissible à l’homme). Il y a eu 340 cas de personnes atteintes par la grippe aviaire entraînant la mort de 209 individus.

Le virus H5N2, quant à lui, a été détecté au Canada l’an dernier (en Saskatchewan) et aux États-Unis (en Virginie). Au Mexique, durant les années 1990, une épidémie de virus H5N2 avait fortement frappé l’industrie avicole.